La pochette de Liquid Swords de GZA en mode bataille rangée sur un jeu d’échecs est l’oeuvre de Denys Cowan et elle n’est pas anodine. Pour mieux la comprendre, il faut creuser un peu le profil atypique de Denys.
Denys Cowan est dessinateur de comics depuis le début des années 80. Il a notamment bossé sur la série Power Man & Iron Fist. Ensuite, il a dessiné des séries plus confidentielles chez DC comme chez Marvel, avec notamment le renouveau de The Question qui lui a amené une très bonne renommée.
Peu après, il rencontre Dwayne McDuffie sur la mini-série Deathlock et c’est là que tout change. Ils décident de monter une coalition d’auteurs afroaméricains au sein du monde des comics. En 1991, ils marquent ensemble un coup culturel très fort en réalisant le comics Prince : Alter Ego, juste après la folie Batman.
C’est alors qu’ils décident de monter leur propre maison d’éditions indépendante, Milestone Media en 1993, avec le but de créer des personnages plus proches des minorités et de s'émanciper du modèle Marvel / DC comme Image ou Valiant l'ont fait à la même époque. Ils développent ensemble des nouveaux héros comme Static, Hardware, Icon ou Kobalt.
Même période, Denys est contacté par le manager du Wu-Tang pour réaliser la pochette de Liquid Swords. Genius est fan du travail de Denys et de la démarche de Milestone Media. De son côté, Denys est fan de rap, il écoute en boucle Public Enemy, Eric B & Rakim, il connait le Wu-Tang mais pas particulièrement GZA. Pas grave. Dans leur ouverture à l’indépendance et à la contre-culture, Denys et GZA se retrouvent.
GZA a plein d’idées pour la mise en scène, une bataille rangée façon comics mais sur un jeu d’échecs. Ils travaillent ensemble tous les détails du livret, les combattants sur des motos, les symboles, les sabres et le style d’armes qu’ils utilisent. Denys réalise alors des esquisses au crayon, juste pour montrer à GZA ce que ça pourrait donner. Et quand GZA les voit, il les scrute longuement et dit :”Pourquoi on utilise pas juste ça ?”.
Les dessins à l’intérieur du livret sont donc quasiment tous des crayonnés extraits des premières esquisses de Denys. Encore à ce jour, Denys est embarrassé que les gens voient ça comme son art définitif alors qu’il s’agit d’esquisses de travail. Mais GZA les voulait comme ça. Et au final ça donne un résultat plus brut, authentique en accord total avec le disque, avec seulement la cover en couleur. Et toujours avec des échecs dedans.
Retrouvez la suite des anecdotes sur GZA, Liquid Swords et les échecs dans notre épisode 15 du podcast.