L'histoire du Smiley déjanté de Nirvana

L'histoire du Smiley déjanté de Nirvana

Le Smiley est totalement intégré à notre quotidien maintenant que nos téléphones sont remplis d’émojis et qu’un message écrit peut être dur à interpréter sans eux. Ce sont nos compagnons sensibles pour mettre des nuances dans nos conversations sans ton. Mais au début des années 90, le Smiley c’est juste ce petit rond jaune avec deux points pour les yeux et un arc de cercle pour une bouche souriante. Un logo qui a traversé les âges et dont il est intéressant de retrouver l’origine.

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La première trace de ce rond jaune est attribuée à Harvey Ball. Après avoir servi son pays pendant la seconde guerre mondiale, Harvey travaille comme graphiste dans une entreprise publicitaire et une compagnie d'assurances, la « State Mutual Life Assurance of Worcester » qui lui demande une image, une illustration qui pourrait redonner le moral à ses employés après une période difficile de rachat et d’absorption d’une autre entreprise.

Harvey dessine ce petit visage jaunes souriant et la compagnie l’adopte directement en faisant des badges, des cartes de visites et des posters qui sont distribués aux employés ainsi qu’aux clients de l'entreprise. La légende veut qu’Harvey n'ait été payé que 45 dollars pour cette création. Et il n’en tira absolument aucun revenu lorsque ce logo est largement utilisé dans tout type de communication et produits dérivés car Harvey Ball ni la compagnie d’assurance de Worchester n’en ont déposé le copyright.

C'est là qui l’histoire devient folle car c’est presque dix ans après que le Smiley est déposé en tant que marque par un… Français. C’est le journaliste Franklin Loufrani qui le dépose car il l'utilise dans les pages de France Soir. On lui avait donné la mission de faire une page spéciale bonnes nouvelles et il s’était dit que ça serait encore plus visuel si le O de France Soir contenait un petit visage souriant. Voyant le succès et le boulevard commercial autour de ce petit symbole, Franklin Loufrani dépose ce smiley d’abord en France puis dans une centaine de pays. Il crée ensuite une société en Grande Bretagne, The Smiley World, dans les années 90. Et là avec son fils Nicolas, ils vont décliner dans tous les sens jusqu’à nos émoticônes partout dans nos téléphones.

Mais la musique dans tout ça me direz vous ? Et bien ça commence dans les années 70 dans un délire très hippie age, notamment dans le Windsor Free Festival en Angleterre qui squatte illégalement pour faire un grand moment de partage à la Woodstock, en gros l’ancêtre des Raves et Free Parties et qui brandissait partout le Smiley de Harvey Ball. Mais c’est un peu plus tard, dans les années 80 aussi en Angleterre qu’un autre mouvement s’en empare totalement : La Dance Music. Son utilisation d’origine viendrait du DJ Danny Rampling rejoignant Paul Oakenfold à Ibiza pour son anniversaire en septembre 1987, le deuxième Summer of Love. Les deux DJs découvrent un univers incroyable notamment dans le club à ciel ouvert l’Amnésia. En revenant à Londres, Danny veut récréer l’Amnésia dans sa propre soirée nommée Shoom. 

Il crée plus ou moins les débuts de l’Acid House en mélangeant les nouveautés venus des US avec le style chaleureux des Baléares. Et pour ses soirées, il importe ce logo Smiley qu’il aurait emprunté aussi à Ibiza, au designer Barnzley qui bossait alors pour le Wag Club et qui portait alors quasi exclusivement des teeshirts, des pins, des badges avec des Smileys dessus, symbole de positivité, d’amour, d’unité et de fun.

Et via ces soirées, le logo est devenu indissociable de l’esprit des Rave Parties et de la Acid House en Europe, mélange sulfureux de bpms endiablés, de drogues psychédéliques, de liberté et d’ouverture d’esprit. Le code est aussi mélangé avec celui du Comics Watchmen qui utilise le Smiley entaché de sang pour caractériser son personnage diabolique Le Comédien. Plusieurs maxis vinyles importants de la culture Acid House vont reprendre ce logo détourné de l’esprit happy good vibes de Harvey Ball.

Et c’est là qu’intervient Kurt Cobain. En 1991, Nirvana vient de signer un gros contrat avec Geffen après un premier album prometteur sur le label indé de Seattle, Sub Pop. On en reparle dans le prochain épisode.

Mais pour cet album en major nommé Nevermind, Geffen veut inonder le marché de visuels et merchandising, il demande donc au groupe quelques idées de logo et autres illustrations. Et Kurt en avait développé une, presque par jeu, qu’on retrouvait sur un flyer pour leur concert de lancement à Seattle. C’était un smiley mais repris de façon ironique, un détournement comme tout le concept grunge, le but étant de tourner en dérision l’industrie de la musique, son côté fabriqué et rébarbatif. 

L’influence de Kurt pour ce logo viendrait d’une institution dans leur ville de Seattle, The Lusty Lady. C’est un strip club historique de la ville qui arborait un smiley sur son enseigne lumineuse très souvent  modifiée en tag pour le rendre lubrique en ajoutant des jeux de mots salaces et des insultes. Ce qui aurait donné aussi le slogan qui va avec le logo dessiné par Kurt : "FLOWER SNIFFIN, KITTY PETTIN, BABY KISSIN CORPORATE ROCK WHORES" Tout viendrait donc d’un club de strip. Ce logo détourné inonde alors le marché de merchandising, décliné dans tous les formats, il devient vite indissociable de l’image de Nirvana, jusqu’au décès de Kurt Cobain. 

L’image est alors figée et reste inchangée jusqu’à maintenant où une nouvelle génération reprend les codes de ces tee-shirts illustrés et provocateurs. La marque Nirvana n’a mêem peut être jamais été aussi forte, portée par des nouvelles stars comme Justin Bieber, raillé par les anciens qui ne retrouvent plus leur contre culture grunge dans tout ça.

Mais bon, Nirvana était un des groupes les plus écoutés des années 90 et aussi un des plus commerciaux, il était apprécié des passionnés comme du public lambda. Donc cette réappropriation de l’image et de son sous texte paraît complètement naturel. Sans forcément écouter la musique, cette new gen embrasse les codes de contre-culture du nom Nirvana et de ce logo à la fois juvénile et désenchanté.

Et ce logo ainsi que tout ce qui en découle, vous le retrouvez sur la collaboration Nixon / Nirvana avec des montres exclusives que vous pouvez trouver sur notre boutique en ligne. Faites-vous plaisir !

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